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“Dale limosna, mujer, que no hay en la vida nada como la pena de ser ciego en Granada”. (Fais-lui l’aumône, ô femme, Car il n’y a plus grande peine Que d’être aveugle à Grenade).

Il faut être à Grenade, dans ses murs et ses jardins pour prendre la pleine mesure des mots du poète mexicain Francisco de Icaza. Car Grenade se donne à voir. C’est par les yeux qu’elle vous pénètre et ce n’est pas une surprise de voir tant de visiteurs armés de leurs appareils en tout genre tenter de fixer des moments forts et intenses.

On est dans l’histoire, dans ses pierres et ses jardins. On ne conquiert pas, غرناطة, Gharnata. Grenade, ce dernier bastion des musulmans en Espagne avant la défaite ultime, n’en finit pas de conquérir. De séduire. C’est elle la conquérante permanente.

D’emblée, la Sierra Nevada (montagnes enneigées), haute gardienne des lieux, annonce qu’on est en des lieux majestueux. Pendant que les yeux, précédant l’esprit, cherchent la fabuleuse Alhambra, le cœur est déjà conquis. Définitivement.

Grenade respire encore l’Andalousie musulmane. Ses habitants en sont fiers. Tout rappelle cette histoire si lointaine et pourtant si présente. Et pour celui qui arrive à Grenade, le plus grand embarras est d’avoir à décider par quel bout commencer cette promenade dans une histoire fastueuse.

Se remettre sur le chemin de retrait de »Boabdil », Abu abdoullah Mohamed, souverain de la dernière dynastie nasride, qui en se retirant de sa ville, s’arrête sur le mont Sacro-Monte ? Là où se dresse aujourd’hui l’Abbaye baptisée du même nom, et contemple son royaume perdu. On ne quitte pas Grenade sans qu’elle ne vous arrache le cœur.

Sur ce mont Boabdil regarde la ville prise 700 ans plus tôt par ses ancêtres qui ont fui Damas, conquise par les Abbassides. Son regard embrasse les jardins paradisiaques du Generalife (Janat Al Arif), l’Alhambra et al Bayazin.

« Gharnata » s’offre à ses yeux comme il ne l’avait jamais vu. Un paradis qui se perd et qu’on essaye de garder, une dernière fois, avant d’être pris par les conquérants castillans.

Comment en est-il arrivé là ? Comment a-t-il remis les clés de sa ville en ce maudit 2 janvier 1492 aux Rois catholiques ?Et malgré soi, on pense aux récits entrés dans la légende. Boabdil qui fond en larmes comme un enfant. « El Chico « , l’autre surnom que lui donne les espagnols, pleure d’impuissance la perte de  » sa Grenade ».

A ses côtés, sa mère, Aïcha al Horra (Aixa la Honesta), qui rajoute à sa peine, implacable, comme un jugement définitif de l’histoire : « Pleure comme les femmes un royaume que tu n’as pas su préserver comme les hommes ».

Cette descendante de rois andalous, symbole de la résistance aux chrétiens, est aujourd’hui, un personnage romantique de la conquista. Les espagnoles gardent d’elle l’image, d’une héroïne tenace et passionnée et continuent à donner le nom d’Aixa, à leurs filles.

Sur ce camino del Sacro-Monto (chemin du Sacro-Monte), on devine les sentiments torrentiels qui ont déchiré mère et fils avant leur exil maghrébin. Ceux qui viennent de pays arabes et musulmans en arrivent même à ressentir ces mêmes peines avec un brin de nostalgie pour des splendeurs passées qu’aiguise un présent terne et délabré.

Grenade mérite plus que des larmes.

Au bout de ce chemin, la vielle ville gitane de Grenade. Les façades sont peintes en blanc à l’image de la majorité des villages de l’Andalousie. De ses veilles caves, les cactus et les agaves percent entre la rocaille offrant de très belles cartes postales.

De ces maisons blanches, certaines taillées dans les grottes (las cuevas) résonnent les airs de guitares. Le Flamenco joué comme nulle part ailleurs. Les rues s’agitent le soir et attirent les touristes. Dans ces « casas-cuevas » s’organisent des fêtes mauresques. Des soirées Flamenco qui s’enchainent jusqu’au bout de la nuit.

Sur la colline qui domine les cuevas est érigé Albaicín ou Albayzín. Un des lieux incontournables pour le visiteur de la ville. Ce vieux quartier de Grenade hébergeait le noyau primitif de la cité antique.

Ses maisons blanches et ses rues étroites, peu propices à la circulation automobile, ont très peu changé depuis les temps des musulmans. On ne peut pas visiter Al Bayacin sans se perdre dans ses ruelles si semblables les unes aux autres. Mais chaque égarement est un réel plaisir. On y fait mille et une découvertes.

Les fontaines d’eau fraîche, les petites échoppes aux pâtisseries au miel, celles des épices orientales et des fruits juteux vous surprendront à chaque tournant. En haut de ces ruelles sinueuses, culmine le mirador Saint Nicolas. Là où les touristes, par milliers viennent admirer l’Alhambra qui se dresse sur la butte en face.

On y dessine, on y danse et on chante du matin au soir. La joie de vivre espagnole gagne rapidement les visiteurs des lieux. On se sourit, on prend des photos et on demande aux nombreux calligraphes qui se sont installés aux quatre coins du mirador d’écrire son prénom en arabe. Oui. Ecrire en arabe est très à la mode à Grenade.

On vous écrira votre prénom pour un euro. Et les touristes s’en vont très fiers d’avoir leurs noms écrit par la langue de ceux qui ont bâti ces lieux mythiques. C’est comme si on y emportait une part de Grenade avec soi.

Légèrement en retrait se dresse la mosquée de Grenade. Ouverte aux touristes, on y pratique toujours les cinq prières. Il se dégage de cette coquette mosquée blanche une réelle quiétude. Sa salle de prière respire la dévotion. Dans son magnifique jardin, près de sa fontaine, des senteurs de roses et de magnolias aux parfums et délices fruitiers isolent le visiteur du brouhaha ambiant au mirador et le transportent dans un monde de sérénité.

Le paradis peut être réellement découvert sur la colline qui se dresse face à Al Bayacin. L’Alhambra « Al hamra » et son Generalife (Janat al Arif) (prochaine partie de ce voyage). Mais on sait déjà que Francisco de Icaza a raison : il n’y a pas plus grande peine que d’être aveugle à Grenade.

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