Pour une issue fédératrice à la crise politique

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Pour une issue fédératrice à la crise politique
Pour une issue fédératrice à la crise politique
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La crise politique prend un aspect dramatique. La répression contre le Hirak a gravi ce 117ème vendredi un nouveau palier. Les interpellations et arrestations sont massives. L’intervention des « brigades anti-émeutes » plus violente. L’émotion est évidemment grande. Le fossé qui sépare le pouvoir du Hirak s’élargit.

Le Hirak est devenu le plus important sinon l’unique moyen d’expression des revendications de la société civile. Sa répression ne peut être ressentie que comme un déni de la liberté d’opinion. Le pouvoir a les moyens de contenir les manifestations hebdomadaires. Les forces de police disposent d’effectifs importants et d’une puissance technique moderne. Il peut obtenir quelques résultats immédiats. Il écume le mouvement de ses cadres et animateurs.

Il dissuade une partie des manifestants. Il escompte ainsi accélérer l’épuisement des forces du Hirak. Cette tactique des forces de sécurité peut s’avérer payante dans l’immédiat. À quel prix ?

Le Hirak, manifestation de la crise politique

Les 117 manifestations hebdomadaires reflètent une mobilisation exceptionnelle et un héroïsme digne du plus grand respect. La détermination de ceux qui « restent présents » voile la lassitude qui gagne une partie des habitués du vendredi. Le mouvement de la société civile est pacifique. Il oppose un front accessible et s’expose donc aux coups des services de sécurité. La répression des manifestations hebdomadaires sert la stratégie du statu quo du pouvoir.

Une stratégie de l’immobilisme bien illustré par un gouvernement sans prétention, un gouvernement sans projet et sans perspectives mobilisatrices. Un gouvernement incapable de donner de l’espoir même à la population plongée dans l’attentisme. La crise politique est profonde. Le Hirak est la manifestation de la crise politique. Il n’est pas l’essence du problème politique principal de l’Algérie.

Ce problème politique principal, c’est la crise profonde de représentation qui donne la mesure de la relation conflictuelle forte entre l’État et la Société civile. L’organisation des élections législatives du 12 juin 2021 constitue une reconnaissance formelle de ce problème politique majeur. Cette initiative court grandement le risque d’être une coquille vide. Il lui manque le contenu politique adéquat.

Prise sous l’angle d’une initiative sincère, elle pêche par une méconnaissance flagrante des conditions à réunir pour une réelle représentation des courants d’opinion présents dans la société. Le monopole de l’opposition politique acquis par le Hirak depuis deux ans reflète une maturation des opinions au sein de la société civile.

Il en exprime également les limites. C’est parce que les courants d’opinions présents dans la société civile ne disposent pas de cadres permanents d’expression à travers des partis politiques et des moyens de presse qu’ils sont contraints de maintenir vivante la flamme de leur indignation dans les marches hebdomadaires du Hirak. C’est coûteux et héroïque.

Le Hirak ne peut devenir un mouvement insurrectionnel. Il n’en a ni la vocation, ni la force. Il est un appel pressant à la solution politique consensuelle.

Une offre politique biaisée

Les élections du 12 juin ne peuvent combler le déficit de représentation de la société civile. Les traditions antidémocratiques établies depuis 1962 privent la société civile de partis politiques représentatifs. Ce sont les dégâts occasionnés par le parti unique et les manipulations politiques de l’État autoritaire depuis le multipartisme de façade de 1989.

Les législatives du 12 juin ne peuvent remplir ce rôle. Le boycott de ces élections par des partis politiques et la grande Région kabyle implique nécessairement le report de ce scrutin. Quel crédit accorder à ces élections quand une partie importante de la population s’abstient. Les pouvoirs concentrés au niveau du Président de la république ne laissent aucune illusion sur les prérogatives de la future Assemblée nationale (APN).

Il n’est pas inutile de rappeler que le pouvoir actuel ne repose pas sur une majorité face à une minorité en attente de l’alternance politique. La pratique du passage en force a été invalidée par les résultats de la présidentielle du 12 décembre 2019 et le référendum sur la Constitution. C’est une évidence de dire qu’une crise politique appelle une initiative politique d’envergure.

Cette initiative doit créer le consensus national. Elle doit détendre le climat politique par la libération des détenus d’opinion et l’arrêt des poursuites judiciaires contre les manifestants et citoyens. Elle doit amorcer le processus de juste représentation de la société.

Un gouvernement d’union nationale

La démocratie est une construction patiente. Le climat de mobilisation créé par le Hirak est propice à cette construction. Le pacifisme est une chance pour l’Algérie. Notre histoire est surchargée de sacrifices en vies humaines. Il est possible de faire l’économie d’autres sacrifices. Le pouvoir en place tarde à se décider. Il doit se résoudre à se débarrasser d’un mode de pensée suranné, de ses préjugés et des égoïsmes outranciers du personnel politique dirigeant.

La lucidité est à ce prix. Le dépassement de la confrontation en sera le résultat. La solution politique n’est pas dans la configuration institutionnelle actuelle. La solution politique ne découlera pas de l’épreuve de force en cours. Elle ne sortira pas des blessures affligées à la société civile. Elle doit intervenir avant que la haine envahisse totalement les consciences.

Cette solution politique sera une réponse exceptionnelle. Une réponse qui ouvre la voie de l’apaisement, du traitement serein des problèmes politiques. Une réponse consensuelle. Une réponse qui a pour horizon l’État de droit. Un horizon pour la coexistence pacifique de toutes les Algériennes et de tous les Algériens dans le respect de leurs opinions et de leurs convictions. C’est l’Algérie de la paix civile instaurée.

Les citoyens investissent de leurs aspirations et de leurs espoirs les personnalités qu’ils respectent. Le cadre gouvernemental est tout indiqué pour les réunir. La constitution d’un gouvernement d’union nationale doté de prérogatives réelles et composé de personnalités représentatives et fédératrices peut constituer cette réponse.

L’alternative est clairement posée : La répression et le passage en force qui sèment la division et la haine. Ou la consultation sans exclusive des acteurs de la vie politique nationale pour fédérer les Algériennes et les Algériens dans la voie du redressement national.

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