Coopératives de théâtre: Hassan Assous parle de l’expérience de Lamalif de Sidi Bel Abbes

2
Coopératives de théâtre: Hassan Assous parle de l’expérience de Lamalif de Sidi Bel Abbes
Coopératives de théâtre: Hassan Assous parle de l’expérience de Lamalif de Sidi Bel Abbes
Google Actualites 24H Algerie

Le metteur en scène Hassan Assous est revenu sur l’expérience de la troupe Lamalif de Sidi Bel Abbes lors d’un débat sur les coopératives théâtrales durant le 14e Festival national du théâtre professionnel (FNTP) qui s’est déroulé du 11 au 21 mars 2021 au Théâtre national Mahieddine Bachtarzi (TNA), à Alger.

« En 1989, nous étions des comédiens au Théâtre régional de Sidi Bel Abbes. A l’époque, il y avait un blocage à l’intérieur du secteur public avec l’absence de moyens et de visions. Le Théâtre de Bel Abbes était dirigé par Kateb Yacine. A sa mort, en 1989, les choses avaient changé avec la création de clans », s’est-il rappelé.

La création par Abdelkader Alloula de la coopérative du 1 Mai à Oran, en 1988, a encouragé le groupe de Sidi Bel Abbes de prendre l’initiative de créer la coopérative  Lamalif.  

« A l’époque, les gens étaient contre la création de coopératives alors que ce système est universel. En Italie et au Canada, il y a des festivals qui sont organisés par des coopératives. Des artistes algériens étaient hostiles prétextant que les coopératives étaient contre le secteur public alors que c’était faux. Il s’agit seulement d’espaces de liberté où nous pouvions monter des spectacles sur lesquels nous avions la maîtrise», a-t-il relevé.

“Travailler dans un cadre de liberté”

Selon lui, des juristes ont aidé Abdelkader Alloula à créer sa coopérative et à élaborer les statuts. “Il faut noter que ce n’est pas l’administration qui a crée les coopératives. Il s’agit d’une initiative d’artistes qui voulaient travailler dans un cadre de liberté avec un statut. Il ne s’agit pas d’associations qui, elles, sont à but non lucratif. La coopérative permet aux professionnels du spectacle vivant de pouvoir continuer à exercer leur métier. C’est ce que nous avons fait à Sidi Bel Abbes avec mon épouse Fadila Assous. Et nous l’avons payé chèrement puisque nous avons été licenciés du Théâtre de Bel Abbes”, a détaillé Hassan Assous.

Le couple Assous a été réintégré plus tard par décision de justice après une année de chômage.

“Je pouvais comprendre qu’on me mette à la porte, mais pourquoi Fadila Assous ? En tant que comédienne, elle a été honorée au Festival international du théâtre expérimental du Caire. Dix jours après ce festival, elle est licenciée !”, a-t-il dénoncé.

Et d’ajouter :  « En une journée, nous avons perdu deux salaires. A l’époque, mon fils était étudiant à Boumerdes. Je n’avais aucune entrée d’argent. Nous avons été sauvés par notre premier spectacle « El besma el majrouha » qui a fait une tournée mondiale. Mes amis tunisiens m’ont soutenu comme Azzeddine Guenoun, Essad El Djamoussi, Dr.Triki, doyen de la faculté des sciences humaines de Sfax. Ils nous ont organisé une grande tournée en Tunisie. Les artistes de Sétif, avec l’appui de la Maison de la Culture, ont collecté 20 millions de centimes pour nous aider et nous ont invité pour jouer le spectacle », a confié Hassan Assous.

« Nous avons travaillé avec nos propres moyens », affirme Hassan Assous

Comme pour la coopérative du 1 mai à Oran, tous les notaires de Sidi Bel Abbes ont refusé d’établir l’acte notarié portant création de la coopérative Lamalif.  « Un ami m’a mis en contact avec un notaire, qui était avec lui à l’université. Il m’a demandé, avant d’accepter le dossier, d’établir une attestation prouvant que nous étions des comédiens. A ce jour, notre coopérative n’a jamais bénéficié de l’aide de l’Etat. Nous avons travaillé avec nos propres moyens », a-t-il dit. « El Besma al majrouha » (le sourire blessé) fut parmi les premières pièces montées par Lamalif d’après un texte de Omar Fetmouche (le titre original était « doudet lahrir »).

La pièce a été jouée en 1992, l’année marquant le début des violences en Algérie. « Nous avions une équipe de professionnels comme le photographe Ali Hefied, le chorégraphe Hadi Cherifa et le scénographe Abderrahmane Zaâboubi. Notre spectacle a été programmé le 31 décembre 1992 à la salle El Mouggar à Alger. La ville était triste. Hadi Cherifa a fait un travail extraordinaire en invitant tous les artistes d’Alger. Le spectacle a eu du succès. Nous avons fait une tournée nationale, une cinquantaine de représentations. Je me déplaçais avec Fadila dans une 4 L en emportant les décors », s’est rappelé Hassan Assous.

Sur les planches de la Royal Court Theatre à Londres

Le 9 mars 1993, la pièce « El besma el majrouha » a été jouée au Palais de la Culture d’Alger, dirigé à l’époque par le romancier Amin Zaoui. « C’était le seul espace bouillonnant. La salle était pleine. Un événement. Une semaine plus tard, Zaoui me contactait pour me dire qu’il voulait proposer notre spectacle au Festival de Carthage, dirigé par Moncef Souissi. Il a été présenté à ce festival aux côtés de la pièce « Alem El baouch » (le monde des insectes) d’Azzeddine Medjoubi (qui a remporté le prix de la meilleure interprétation masculine) », a noté Hassan Assous

« Après « el besma el majrouha » a été présenté dans d’autres pays notamment en Italie et en Grande-Bretagne. Nous avons joué la Royal Court Theatre de Londres, l’espace de Harold Pinter », a-t-il précisé. Dramaturge et scénariste, Harold Pinter a été consacré prix Nobel de littérature en 2005. Il est connu pour ses pièces politiques et ses comédies noires.

Hassan Assous s’est souvenu des moments de préparation du spectacle « El Besma el majrouha », dans son appartement à Sidi Bel Abbes : « Ali Hefied, Omar Fetmouche, Abderrahmane Zaaboubi, Hadi Chérifa passaient la nuit chez moi ».

« Nous ne sommes pas contre le secteur public »

Hassan Assous a dirigé pendant plusieurs années le Théâtre régional de Sidi Bel Abbes (TRSB). « Et j’ai géré le TRSB comme une coopérative, une compagnie », a-t-il dit. Il a prévenu contre une volonté de caporalisation par l’administration des coopératives théâtrales. « Nous ne sommes pas contre le secteur public, au contraire, nous voulons qu’il existe. J’étais avec Kateb Yacine et nous étions subventionné par le ministère du Travail », a-t-il dit.

Il a enfin confié que le nom donné à la coopérative « Lamalif » était inspiré d’un poème de Hmida Layachi et du titre de la revue du mouvement de gauche marocain, « Ila Al Amame » (en avant), fondé par Abraham Serfaty et Raymond Benhaïm.

Article précédentEducation nationale: modification du calendrier des examens du 2è semestre
Article suivantSéisme: quatre nouvelles répliques à Bejaia

2 Commentaires

Laisser un commentaire