A Alger, un historien français appelle à “ouvrir les archives” sur “la guerre des grottes”

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A Alger, un historien français appelle à
Les grottes de Dahra 1885
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L’historien français Christophe Lafaye a appelé, samedi 4 juin 2022, les autorités françaises à “ouvrir les archives militaires” sur “la guerre des grottes” menée contre les Algériens durant la période coloniale.
Invité du Forum du quotidien national El Moudjahid, Christophe Lafaye, historien, a évoqué l’utilisation de gaz toxique par les troupes coloniales françaises, notamment dans des grottes, déjà habitées.


“Il s’agit de guerre chimique souterraine à laquelle l’armée coloniale a eu recours en Algérie durant la période 1956-1961, en utilisant du gaz mortel contre les femmes, les enfants et personnes âgées réfugiés dans des grottes et des casemates. “La guerre des grottes”, une autre page sombre des exactions génocidaires qui relèvent d’un véritable crime d’État et qui, du fait qu’il est ” verrouillé, aujourd’hui encore, par l’administration française en charge des archives, constitue un épisode peu connu des exactions inhumaines commises par l’armée coloniale”, a précisé Mohamed Koursi, directeur général d’El Moudjahid, cité par le journal. 


“Une guerre souterraine”

Selon Christophe Lafaye, l’armée française a mené une guerre souterraine en utilisant des armes chimiques, en violation du protocole de Genève de 1925 qui en interdit l’utilisation.
“L’épisode de la guerre de grottes n’est pas le premier en son genre que les Algériens ont subi. Au début de la colonisation, il y a eu plusieurs enfumades, dont la plus célèbre a été celle de Dahra en 1845”, a-t-il indiqué.


Entre le 18 et e 20 juin 1845, un millier de personnes, dont des femmes et des enfants, de la tribu des Ouled Riah, ont été tués asphyxiés dans la grotte des Frariche, dans les monts de Nekmaria, dans le Dahra, à l’extrême Est de Mostaganem, sur ordre du maréchal Aimable Pélissier, appelé aussi Duc de Malakoff, devenu gouverneur général d’Algérie en 1860, et plusieurs fois décoré par des “médailles militaires” pour ses “actes de guerre”.
Le théoricien allemand Karl Marx fut parmi les rares européens à avoir dénoncé publiquement “les enfumades du Dahra”. 


“Des archives cadenassées”

“Ces enfumades se sont poursuivies dans le secret durant la guerre.  Comment est-ce possible qu’il y ait eu utilisation du gaz à partir de 1956 en Algérie, notamment après le massacre de l’Indochine durant la Seconde Guerre mondiale ?” s’est demandé Christophe Lafaye. Après 1945, et la fin de la deuxième grande guerre, les pays européens, dont la France, avaient pourtant décidé de ne plus recourir aux armes chimiques.


Un engagement qui, selon l’historien français, n’avait pas été respecté par Paris en Algérie.
Selon lui, pour déloger les combattants de l’Armée de libération nationale (ALN) de leurs refuges, dont les grottes, l’armée coloniale française avait utilisé massivement du gaz et des produits chimiques.


“Dans une enquête publiée dans la revue trimestrielle XXI (tome 58 paru le 1er avril 2022), la journaliste Claire Billet publie des témoignages inédits d’anciens militaires français racontant leur rôle dans les « sections des grottes » mobilisées contre les abris souterrains de ALN. Parmi les « armes spéciales » – euphémisme alors en vigueur – figurent des grenades, chandelles et roquettes chargées de gaz de combat, notamment le CN2D, contenant de la DM (diphénylamine chloropsine). Produit chimique toxique, cette dernière provoque l’irritation des yeux, des poumons et des muqueuses, ainsi que des maux de tête, des nausées et des vomissements”, précise le quotidien français Le Monde.


Selon la même source, des historiens français ont lancé un appel en avril 2022 pour l’ouverture des archives militaires sur l’utilisation d’armes chimiques, par l’armée française, pendant la guerre d’Algérie.
“Selon ces historiens, ces faits sont connus, mais n’ont pas été travaillés parce qu’ils renvoient à des questions taboues et que les archives sont «cadenassées»”, note le quotidien algérien El Watan.


Et d’ajouter :  “Sur le plateau de TV5 Monde, Claire Billet explique qu’il a fallu attendre 60 ans pour connaître ce recours aux gaz toxiques, parce qu’il s’agit d’opérations secrètes, parce que les archives ont été classées “secret défense” et parce que les soldats se sont murés dans le silence jusqu’à ce que le besoin puissant les pousse, à l’approche de la mort, de libérer leur parole. Un élan d’expression qui indispose l’armée et provoque de la gêne, voire de la colère, au plus haut des autorités militaires et civiles”.


“Il est temps pour les citoyens français de regarder ces violences de guerre bien en face, pour mieux comprendre ce passé qui ne passe pas», souligne Christophe Lafaye. Il rappelle que l’Allemagne n’a pas hésité à ouvrir les archives de la Stasi (police politique), coupable de crimes contre les opposants durant “la guerre froide”.

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