A Oran, la résidence de Yves Saint-Laurent reprend vie

0
A Oran, la résidence de Yves Saint-Laurent reprend vie
Google Actualites 24H Algerie


La résidence du célèbre couturier français Yves Saint Laurent (YSL) est ouverte au public à Oran depuis le 1 juillet 2022. Et, un espace muséal est consacré aux travaux de YSL à l’hôtel Liberté à Oran.
C’est une initiative de l’homme d’affaires et mécène Mohamed Affane.


“La maison était complètement abandonnée. Nous avons réalisé un film de 13 minutes pour montrer toutes les étapes de réhabilitation et les travaux menés sur place. Nous avons décidé de reprendre cette maison pour la faire visiter. Je n’ai pas de complexe, je suis fier d’Yves Saint Laurent. Si demain, on donnait le nom d’Yves Saint Laurent à une maison de la Culture ou à un théâtre en Algérie, j’en serais fier. Nous revendiquons le couturier comme un algérien oranais”, explique-t-il à 24 H Algérie.


Située à l’ex-rue Stora, Frères Chemloul actuellement, la maison, peinte en jaune et en bleu, le fameux “bleu d’Oran” que le couturier adorait, est construite sur deux étages.


“Cette résidence a été construite en 1913. Les travaux de réhabilitation et de rénovation ont duré une année et demie en respectant toutes les normes. La maison était dans un mauvais état, abandonnée. Tout était fermé.  La maison a été rachetée par M. Affane. Il y a un salon, un bureau des parents du couturier, et l’atelier où il travaillait. L’ameublement a été reproduit à l’identique à partir de photos. “, a expliqué, sur place, le jeune guide Moussa Bensalah.


“Nous avons gardé la mémoire des lieux”

Youcef Fernane, architecte et chef de projet, rappelle que l’idée de M. Affane de reprendre la maison natale de YSL était dans sa tête depuis vingt-cinq ans.


“Depuis une année, il a concrétisé ce projet avec le rachat de cette résidence. C’était un gros chantier de restauration avec des travaux de consolidation de la structure. Nous avons conservé les carreaux de ciment. La boiserie a été restaurée par des artisans algériens. Nous avons gardé la mémoire des lieux avec la salle à manger, le salon et le bureau. Après, pour le reste de la résidence, il y a deux chambres. Nous voulons offrir la possibilité aux designers ou aux stylistes-modélistes de passer une nuit dans la maison de YSL”, précise-t-il.


L’acquisition des meubles a été faite, selon lui, après des recherches sur des photos d’archives de la famille Saint Laurent.


“Le style prédominant est l’art déco. A partir de là, nous avons contacté des fournisseurs principalement ici à Oran et à Alger pour essayer de recréer l’atmosphère de l’époque avec la présence de photos de famille et des photos du  parcours de YSL : le lycée où il a étudié, la clinique où il est né, l’école des beaux où il a fait ses cours pour remettre le visiteur dans le contexte de l’époque”, dit-il.


“La résidence sera ouverte pour les visites”

“On se sent bien à l’intérieur de cette maison.  Yves Saint Laurent était un artiste qui vivait sur une autre planète. Il parlait tout le temps du fait qu’il soit né à Oran en Algérie.  Je suis oranais et il est oranais et algérien comme moi. Ould bladi !”, souligne Mohamed Affane.


Youcef Fernane précise que la résidence privée est à visiter sur réservation au niveau de l’hôtel Liberté à Oran (propriété de Mohamed Affane).


“La résidence sera ouverte pour les visites six jours sur sept, du lundi au samedi. Une visite à 10 h et une autre à 15 h. L’espacé muséal est également ouvert aux visites au niveau de l’hôtel Liberté où sont exposées les copies de son travail à Oran. Nous avons pu rassembler près de 600 croquis jusqu’à maintenant. Et, on espère enrichir cette collection pour montrer aux visiteurs la production de YSL à Oran.  Il est né à Oran, c’est la genèse de sa création et de son génie”, détaille-t-il.


À l’hôtel Liberté, l’espace muséal est consacré aux croquis, dessins, œuvres et photos du créateur français.


Yves Saint Laurent a réalisé 300.000 croquis en Algérie !

“Là, il y a  les croquis faits à partir de l’âge de 12 ans. Il faut savoir que Yves Saint Laurent a réalisé 300.000 croquis en Algérie ! C’est un véritable trésor. Il est allé voir une pièce au théâtre et il a repris le dessin des costumes. Il s’est inspiré du théâtre d’Oran. Il aimait les décors. Jusqu’à l’âge de 17 ans, il voulait être décorateur de théâtre. Il a finalement choisi la haute couture. Sa mère, une femme du monde, aimait bien s’habiller, recevait des revues de mode que Yves, jeune, consultait. Cela lui a donné des idées, a découvert la mode à travers ces revues. Il découpait les mannequins des magazines et leur créait des tenues”, explique Mohamed Affane.


Et d’ajouter : Ici, on retrouve des illustrations de Madame de Bovary, des couvertures de revues d’époque comme “Mode et travaux”, “Marie Claire”, “Echo de la mode”… Là, on projette dans une petite salle un film court sur la vie et l’œuvre YSL.   Rassembler tout cela m’a pris une année. J’ai visité le Centre Pompidou, la bibliothèque Mitterrand, les banques de l’image privées en France. Des amies m’ont aussi fait des recherches aussi”.  


L’espace est divisé en plusieurs parties où l’on peut voir par exemple les créations de YSL Laurent entre  1953 à 1955.


“YSL  était un génie. A 30 ans, il n’avait plus rien à prouver. Un homme comme celui-là, nous devons le récupérer. Il est né chez nous. Il a lui même dit qu’il avait passé ses plus belles années à Oran. Son dernier voyage en Algérie remonte à 1993. Il est resté trois jours chez son ami d’enfance à Trouville (Aïn El Türck) sur la corniche oranaise”, appuie Mohamed Affane.


“Les jeunes designers algériens ne savent pas que Yves Saint Laurent est né à Oran”

Oran se rappelle-t-elle de YSL? “Cela fait 25 ans que je voulais faire quelque chose pour cet enfant d’Oran. On organise des défilés de mode et des événements liés à la couture à Oran. Les jeunes designers et les mannequins algériens qui viennent ne connaissent pas YSL, ne savent même pas qu’il est né et a vécu à Oran. Nous ouvrons toujours la porte à des créateurs algériens pour mieux faire connaître la haute couture aux gens. La haute couture est un art aussi”, répond-t-il.


Mohamed Affane plaide pour la création à Oran d’un musée Yves Saint Laurent, à l’image de ce qui existe déjà à Marrakech au Maroc. “Le musée d’Oran doit inclure tous les créateurs algériens de haute couture”, dit-il.


Henri Donat Mathieu-Saint-Laurent, ou Yves Saint Laurent, est, pour rappel, né le 1er août 1936 à Oran. Il  quitte l’Algérie en 1954 pour s’inscrire à la Chambre syndicale de haute couture à Paris et participer au concours international de la laine.

Il remporte le premier prix de la catégorie robe aux côtés de Karl Lagerfeld dans la catégorie manteaux, rejoint ensuite la maison de Christian Dior à Paris. A la mort du propriétaire en 1957, il le remplace en tant que directeur artistique. La rencontre avec Pierre Berger, en 1958, va relancer véritablement la carrière de YSL.

Il crée sa propre maison de haute couture en 1961, se fait remarquer par des modèles révolutionnaires tels que la robe trapèze, le smoking pour femmes, la robe Mondrian (inspirée de l’art abstrait du néerlandais Piet Mondrian), la saharienne, les blouses transparentes, la combinaison pantalon (inspirée des tenues des aviateurs)…


Créateur du tailleur-pantalon pour femmes

Favorable aux idées de simplicité et de souplesse, il crée le tailleur-pantalon, la jupe est remplacée par le pantalon. Une grande évolution à l’époque. “Je n’aime pas le pantalon lorsqu’il est porté d’une façon revendicatrice, pour que la femme dise je suis l’égale de l’homme, ce côté George Sand, suffragettes, enfin je n’aime pas cela du tout. Je pense qu’au contraire, en portant un pantalon, une femme peut développer son maximum de féminité”, disait Yves Saint Laurent, considéré comme un couturier féministe.


YSL a rendu hommage dans ses créations à plusieurs peintres comme Van Gogh, Matisse, Andy Warhol ou Braque.


YSL est décédé le 1er juin 2008 à Paris, six ans après avoir quitté la direction de sa maison de couture. 

Article précédent“Roza Hnini”, une critique au vitriol de la fausseté et du paraître
Article suivantRéouverture des frontières algéro-tunisiennes : M. Beldjoud rencontre à El Tarf son homologue tunisien

Laisser un commentaire