L’ombre d’un doute de Nadia Agsous… de la short story au roman

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L’ombre d’un doute de Nadia Agsous… de la short story au roman
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Nadia Agsous est journaliste, chargée de communication et écrivaine. Parallèlement elle anime une émission – AlternaCultures- sur Alternatv, média alternatif lancé par des Algériens vivant au Canada.  Elle vient de publier son premier roman “L’Ombre d’un doute” aux Editions Frantz Fanon.

Le récit était initialement prévu comme une «short story». C’est son éditeur, Amar Inagrachen, qui lui a proposé d’en faire un roman dont le récit «s’est construit au gré de sa réécriture».

Native d’une ville côtière riche par son histoire et les brassages des populations qu’elle a connue, Nadia Agsous a toujours été fascinée par ces villes historiques.

Nous sommes en 1602 ! Période des Pachas et des Aghas en Algérie. Le choix de cette période voulue par Nadia n’avait pas d’autre objectif que la recherche d’une « dramatisation »  de la mémoire collective d’une ville imprégnée profondément par un personnage emblématique. C’est dans ce contexte que Nadia nous fait vivre son récit au travers des personnages étranges mis en scène et la description d’une ville, Bent’Joy, connue pour son essor culturel et intellectuel, à la recherche de son identité.

Sidi Akadoum est un des ces personnages emblématiques du roman qui « éblouissait et séduisait par son verbe et l’habileté de son comportement ». Il a réussi à conquérir le cœur des habitants de la ville et, remarqué par le Prince régnant, il se fait nommer comme Vizir par ce Prince qui, avant de mourir, lui prodiguât de précieux conseils au cas où il serait au pouvoir. Cet homme qui « défia le temps et rendit l’éphémère éternel » sera tantôt adulé, tantôt détesté par les Bent’Joyiens. On lui reproche tout et son contraire. Excellent orateur, visionnaire, manipulateur, peut être un possédé guidé par son livre sacré Abrid Al’Aalii.chan et par son Miroir des visions illusoires !

Nadia Agsous et le roman du passé et du présent

Élevé au rang de prophète, cet illuminé ne cessera de manipuler les masses pour arriver à ses desseins. Il n’hésita pas alors à « dépouiller la ville de son passé » en la « condamnant à vivre engouffrée dans son présent ».

Le changement de statut du personnage qui devient lui-même narrateur rajoute à l’intrigue qui se déploie le long du roman avec aisance. Jeune homme sans nom ni prénom, Nadia le voulait afin que l’on retienne de lui son action et ses pensées plus que son identité.

Le sort des femmes, la fragilité de leurs acquis sociaux, leurs rapports avec les hommes et de la population avec le pouvoir en place occupent une place importante dans le roman.

« Les vérités historiques sont rarement bonnes à entendre lorsqu’elles ébranlent les fondements de la mémoire collective » clamait isabelle Hausser. Dans ce roman, l’auteure tente d’expliquer le mécanisme par lequel la mémoire collective peut être confisquée, manipulée à outrance pour légitimer le pouvoir dans une ville qui affichait pourtant fièrement sa culture et son rayonnement.

La description des personnages, des lieux et des ambiances font défiler dans la tête du lecteur un monde imaginaire certes, mais ô combien réaliste. Ponctué par des phrases courtes qui se limitent souvent à un seul mot, et par les interventions de cette femme habitée par la folie blanche, l’auteure nous entraine dans un dédale de situations qui dévoilent la nature humaine à la fois dans toute sa splendeur comme dans toute sa laideur.

Bien que l’auteure s’en défend, il est difficile de ne pas faire le parallèle entre cette « tentative de désacralisation d’une mémoire collective » et la situation actuelle de le « nouvelle Algérie ».

Pour Nadia, Bent’Joy est une ville universelle. On peut la situer un peu partout dans le monde, là où sévissent des dictateurs et là où vit une population qui s’agrippe à son passé tout en obéissant aveuglément au pouvoir en place.

Pour l’anecdote, un détail important apparait dans le roman et qu’on laissera le lecteur concentré le découvrir, fait penser à une ville algérienne contemporaine. La lecture de ce roman nous tient en haleine du début jusqu’à la fin. Romancer un sujet aussi important n’est pas aisé. Nadia Agsous a réussi à le faire avec brio.

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