Mali: le Premier ministre accuse la France d’avoir voulu “diviser” le pays

2
Mali: le Premier ministre accuse la France d'avoir voulu
Google Actualites 24H Algerie

Bamako accuse la France d’être derrière les sanctions de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) contre le Mali.


Choguel Kokalla Maïga, Premier ministre malien, a porté de lourdes accusations contre la France lors d’une interview accordée à la chaîne malienne ORTM 1.


 “Qui a détruit la Libye pour répandre des armes partout, amener des mercenaires, couper le Mali en deux ?  Ce n’est pas nous qui le disons, mais des responsables français qui ont dit qu’il faut diviser le Mali. J’ai des noms. Tout est documenté”, a-t-il déclaré.
Et de poursuivre : “et des responsables d’anciens mouvements rebelles qui disent clairement que c’est la France qui leur a dit : “on va diviser le Mali et vous donner l’indépendance”. Ils ont compris plus tard que la France voulait les utiliser pour affaiblir l’Etat malien et faire ce qu’elle veut”.

Il est revenu sur le sommet de la Cédéao à Dakar en 2012 lorsque “la crise” malienne avait commencé. “Comme par hasard, le ministre des Affaires étrangères français Alain Juppé était venu à ce sommet. Et lorsque la Cedeao avait décidé d’une force d’attente de 3000 hommes pour libérer le Mali (des groupes terroristes), M.Juppé avait dit “non, 3000 hommes c’était trop par rapport à 500 combattants irrédentistes””, a-t-il souligné.


“Le terrorisme a quitté l’extrême nord du Mali pour se déployer dans 80 % du pays”

Il a rappelé que le Mali avait demandé, à travers la Cédéao et l’Union africaine, la création d’une force internationale, appelée la MISMA ( Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine). La MISMA, qui comprenait des soldats de 14 pays africains, a été créée en janvier 2013, autorisée par une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU. “Dès sa création, les diplomates français ont commencé à dénigrer la MISMA. Les écrits existent. On a fait traîner les choses. Quand on a constaté l’absence des capacités de la MISMA, on a créé la MINUSMA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali)”, a-t-il noté.


Il a rappelé qu’il a été dit que la MINUSMA allait aider les maliens à “lutter contre le terrorisme” alors que son rôle est “le maintien de la paix”. Choguel Kokalla Maïga a soutenu que  lorque l’opération militaire française “Serval” avait commencé le 11 janvier 2013, le président français avait évoqué trois objectifs : “détruire le terrorisme, aider à restaurer l’intégrité du territoire malien et appliquer les resolutions des Nations Unies”. “Neuf ans après, le terrorisme a quitté l’extrême nord du Mali pour se déployer dans 80 % du pays. L’intégrité du territoire n’est pas rétablie et les résolutions des Nations Unies changent chaque année au point que cette année nous nous sommes opposés à l’une d’elle. Tirez vous même la conclusion”, a-t-il appuyé.


Et d’ajouter : “savez-vous qu’en 2014 lorsque l’armée malienne avait essayé de reprendre la totalité du territoire du pays, il y a eu des affrontements dans l’extrême nord. Les soldats maliens se sont réfugiés dans un camp de la MINUSMA, on les avait désarmé. Et lorsque l’armée malienne avait voulu récupérer les armes, le commandant français de l’opération Barkhane avait refusé en disant qu’il s’agissait d’un butin de guerre qui appartient à la CEMA (Chef d’État-Major des armées)”.


“Nous sommes revenus pour cent ans”

L’opération militaire française Barkhane avait, pour rappel, remplacé en août 2014 les opérations “Serval” et “Épervier”. Elle a été commandée par huit généraux de division ou de brigade, l’actuel commandant étant Laurent Michon.


“Au Tchad, le commandant de Barkhane avait déclaré à ses troupes en 2016, et cela va vous faire froid au dos, ceci : ” “nous étions venus ici, il y a cent ans (Afrique). Nous sommes partis, il y a soixante ans. Nous sommes revenus pour cent ans”. Au Mali, il y a plusieurs forces, l’armée malienne, Barkhane, J 5 Sahel, Takuba, EUCAP Sahel et la situation ne fait qu’empirer, à la fin, c’est la désintégration de l’Etat, la suite, on peut l’imaginer”, a soutenu le Premier ministre malien.


Il a cité un autre exemple : “le 17 novembre 2015, le commandant de Barkhane avait tenu une conférence de presse ici pour accuser les mouvements signataires (de l’Accord de paix d’Alger) d’avoir un pied avec les groupes terroristes et un autre avec l’Accord. Cela veut dire quoi ?”.


Selon lui, les troupes françaises ont empêché l’armée malienne de se déployer dans le nord du Mali. “Ils ont amené 4000 militaires français, fait venir des africains et la MINUSMA. Ils ont interdit à l’armée malienne d’accéder à une partie de son territoire alors qu’ils proclament que c’est pour recouvrer l’intégrité du territoire. Donc, il y a le discours apaisant et la réalité. Lorsque l’armée avait voulu envoyer un avion pour suivre le mouvement d’un groupe terroriste au nord, ils ont refusé prétextant qu’il s’agissait d’une zone d’entraînement nocturne de Takuba (force européenne). Nous n’allons plus demander d’autorisation pour survoler notre territoire à qui que ce soit “, a annoncé Choguel Kokalla Maïga.


“Terrorisme diplomatique”

Il a précisé que la Cédéao a décidé que les avions ne survolent plus le Mali. “Et à Paris, on débarque les voyageurs ayant déjà des billets en leur disant que c’est les militaires maliens qui empêchent l’atterrissage des avions à Bamako. Ce n’est pas vrai. Après, on leur dit que c’est l’Elysée qui a décidé que les vols vers le Mali sont annulés juqu’à nouvel ordre”, a-t-il dit en dénoncant “le terrorisme diplomatique et médiatique” mené contre le Mali.


La Cédéao, qui regroupe 15 Etats ouest-africains, a décidé le 9 janvier 2022 de mettre le Mali sous embargo, de couper les aides financières, de geler les avoirs du Mali à la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et de fermer les frontières avec ce pays en raison du “refus” des autorités de transition à Bamako d’organiser des élections présidentielles et législatives qui étaient annoncées pour le 27 février 2022. Les ambassadeurs des Etats membres de la Cédéao ont été rappelés aussi.


“Le destin de l’Afrique se joue au Mali”

Pour Choguel Kokalla Maïga, les sanctions de la Cédéao sont influencées par des prises de positions extra-africaines. “On est en train de nous faire une mauvaise guerre. Si on enlève les influences étrangères, qui ont d’autres agendas, on peut se comprendre entre africains. Le destin de l’Afrique se joue au Mali. Nous ne sommes pas un peuple qu’on peut vassaliser, qu’on peut rendre esclave par procuration. Il y a un processus de vassalisation de l’Etat malien à travers la Cédéao”, a-t-il accusé.


“Nous voulons qu’à la fin de la transition, nous ayons un pays réhabilité et un État stable. Les nouveaux responsables auront un pays à gouverner, pas des incendies à éteindre. Il faut se donner le temps d’organiser une transition responsable”, a-t-il ajouté.

Article précédentPort d’Alger : recul de l’activité au 3ème trimestre 2021
Article suivantZineb Sedira, boxeuse en mer

2 Commentaires

  1. “« Dès sa création, les diplomates français ont commencé à dénigrer la MISMA. Les écrits existent. On a fait traîner les choses. Quand on a constaté l’absence des capacités de la MISMA, on a créé la MINUSMA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali) »

    Où comment reconstruire l’histoire. Lisez donc ce document. Peut être que Choguel Kokalla Maïga n’a pas lu la résolution 2071 de l’ONU. Voici le prononcé du PDT Français à la même époque:

    “Je pense qu’au Conseil de sécurité il y aura une volonté de mettre en place cette force d’intervention mais je veux être très clair, c’est aux Africains d’en décider. D’abord, c’est le gouvernement malien uni, Premier ministre et président, qui l’a demandé ; c’est la CEDEAO qui aura à organiser cette force avec l’Union africaine ; je salue d’ailleurs son président qui a été très actif pour accélérer les choses.
    Et nous, nous serons loyaux par rapport à ces partenaires et nous serons respectueux de la légalité internationale. Si on nous demande notre appui logistique, c’est-à-dire du matériel, un certain nombre d’informations, nous les fournirons.”
    Entretien du président de la République avec « RFI-France 24-TV5 Monde » – Paris, 11 octobre 2012

    Alors bien sûr que la France a fait des erreurs dans cette affaire, mais arriver à une telle manipulation des faits relève de la calomnie la plus grossière.

  2. Bonjour,

    Le ministre Choguel Kokalla Maïga est un vieux limier de la politique politicienne. Mais il refait l’histoire passé sans rappeler le contexte de l’époque. Il omet de parler des discours du Président Hollande de Novembre 2012, il omet de parler des difficultés à l’époque de la mise sur pied de la MISMA, il omet de parler de l’état de l’armée malienne à cette époque. Il omet de parler des événements de 2014 liés l’antagonisme de Moussa Mara et IBK. Cette histoire se soldera par une centaine de morts après la venue à Kidal de Moussa Mara), il omet de parler de l’échec de la tentative de reprise de Kidal par l’armée malienne en Mai 2014 sans aucune concertation avec ceux censés les appuyer avec à la clé une nouvelle déroute.

    https://www.au-misahel.org/historique-de-loperation-misma/

Laisser un commentaire