Hier comme aujourd’hui, la force libératrice du 5 juillet

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Hier comme aujourd'hui, la force libératrice du 5 juillet
© Ghada Hamrouche
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Dans l’histoire des peuples opprimés, il y’a de ces moments de grâce rares qui bousculent l’ordre des choses et ouvrent la voie aux aspirations de dignité, de liberté et de justice jusque-là refoulés dans les profondeurs des individus. Pour l’Algérie, ce fut le cas avec le sursaut historique et salvateur de novembre 1954, quand le peuple algérien, alors réduit à la servitude sous le joug du colonialisme français, décida de briser ses chaînes pour recouvrer sa dignité humaine et libérer son pays de l’envahisseur étranger. Une libération que nous célébrons chaque 5 juillet depuis 58 ans. 

Nous savons tous les souffrances endurées par nos parents et grands-parents pour faire de nous un peuple libre et maître chez lui. Une liberté écrite avec leur sang, cette encre indélébile qui scelle le destin de la nation algérienne.

Malheureusement, même si ces souvenir glorieux de notre histoire revient chaque année dans notre actualité, ils ont perdu de cette vigueur patriotique qui nourrit l’esprit d’appartenance, à tel point que l’Algérie de la Révolution exemplaire s’est retrouvée quelques décennies plus tard enfoncée dans la forfaiture et l’humiliation sous la gouvernance d’un néo-colonialisme avec son prince régnant Abdelaziz Bouteflika. Une gouvernance qui n’a cessé d’insulter l’histoire de ce pays, atteignant le summum avec le triste épisode d’un président algérien moribond qui gouverne à partir du Val de Grâce, haut lieu de l’armée française, sous le portrait du président François Hollande. Cette image profondément blessante pour les populations algériennes résume à elle seule la déchéance de leurs gouvernants. Tous ces abus du narcissique et mégalomane président ont fini par faire naître chez son peuple un état d’esprit en perpétuelle révolte. Aussi, la tentative de le reconduire en force pour un 5e mandat a été l’ultime humiliation qui a motivé la sortie en masse des Algériens dans les rues pour bloquer son passage. C’est la naissance du grandiose Hirak, un mémorable 22 février 2019.  

Hirak ou acte 2 de la libération du peuple algérien

Le moment est historique et nul n’a le droit de le déprécier, sous aucun prétexte, l’hérésie de la main étrangère que certains agitent, en tout premier lieu. C’est un acte de rupture symbolique imposée par le peuple et d’une portée semblable à son sursaut de novembre 54. Un cri du cœur jailli des entrailles d’un peuple maltraité qui signe cette rupture spectaculaire et historique entre lui et le régime honni qui écrase l’Algérie. D’abord par le nombre, ils sont des millions de manifestants d’un bout à l’autre de l’Algérie. Aussi par sa cohésion, tous les Algériens, quelle que soit leur appartenance politique ou idéologique, scandent le départ du régime. Et par son pacifisme exceptionnel, nulle violence, ni perte humaine n’ont entaché le long parcours du Hirak. Bref, le mouvement fait l’admiration du monde qui découvre Vendredi après Vendredi les manifestations grandioses d’un peuple qui s’émancipe paisiblement, l’armée s’étant apparemment rangée de son côté notamment en neutralisant les sources potentielles de violence contre les manifestants tout en valorisant les revendications de changement. D’où le fameux slogan des premiers mois du Hirak «djeich chaâb khawa khawa» scandé par les manifestants.

En quelques semaines de cette grandiose démonstration, le Hirak gagne ses lettres de noblesses et réalise ainsi l’acte 2 de la libération du peuple algérien en lui redonnant la dignité, la parole et la liberté confisquées par le régime autoritaire. Chaque Vendredi, depuis ce jour historique du 22 février 2019, le Hirak a fait sombrer peu à peu les pans du régime pour inventer son projet de la nouvelle Algérie qui peuple ses rêves. Il a réussi non seulement à empêcher le 5e mandat, mais aussi à pulvériser la toute puissance du régime en emprisonnant les plus illustres représentants de sa malfaisance et de sa corruption dont des premiers ministres, des ministres, des députés, des sénateurs, des hauts gradés (généraux et officiers supérieurs des renseignements) ainsi que des hommes d’affaires véreux. Bref, tous ces indus responsables qui ont fait du pillage, de l’impunité  et de l’injustice le mode de gouvernance en Algérie, plongeant son peuple, sa jeunesse en particulier, dans le désarroi.


Impasse, doute et espoir, le laborieux parcours du Hirak

Certes, il est trop tôt pour faire un bilan exhaustif des transformations, à moyen et long terme, produites par le Hirak sur l’évolution de la société algérienne, au plan des libertés, de la justice et d’équité sociale, bref, de citoyenneté, mais une chose est sûre, le peuple algérien est résolu à tourner définitivement la page de l’Algérie des apparatchiks, de la corruption et des généraux faiseurs de présidents. La tâche est gigantesque au vu, d’une part, de la nature complexe du pouvoir algérien caractérisé par l’opacité et l’autoritarisme, et d’autre part, des divergences profondes qui traversent la société algérienne et nuisent au consensus au sein du Hirak. Aussi, à mesure que les mois passent sans qu’émergent des forces consensuelles au sein du Hirak, et malgré les acquis incontestables de celui-ci, son discours perd de sa puissance et se heurte à l’intransigeance des nouvelles autorités qui refusent toute solution à la crise en dehors du cadre constitutionnel. Solution que le Hirak rejette en bloc et opte pour une période de transition et une constituante comme sortie de crise. Entre les deux tendances, c’est un bras de fer qui va crescendo jusqu’aux élections présidentielles du 12 décembre 2019. Une période durant laquelle le rapport de force, qui faisait jusque-là la puissance du Hirak lui permettant de braver le pouvoir du haut de ses millions de manifestants, va basculer au profit des partisans de la solution constitutionnelle à laquelle vont s’associer différents acteurs sociaux et politiques qui rejoignent le panel de dialogue et l’autorité nationale indépendante des élections. Le Hirak qui ne participe à aucune de ces initiatives, continue de subir d’importantes défections dans ses rangs d’autant qu’après plusieurs mois d’existence, il n’avait produit ni véritables leaderships, ni projet rassembleur à même de lui éviter l’impasse actuelle.   

De la grande démonstration au projet de la nouvelle Algérie

Aujourd’hui, bien qu’on soit fondé de dire que le Hirak n’a pas tenu toutes ses promesses des premières heures, sa force de rupture avec l’ordre ancien et ses prouesses de renouveau algérien restent un moteur de changement important qui agite la société dans ses profondeurs. Et même si le pouvoir semble avoir gagné la partie en ne changeant que superficiellement la nature du régime politique, l’Algérie est loin d’avoir fini avec l’épisode du Hirak du 22 février 2019. La jeunesse qui porte le souffle du changement a tout l’avenir devant elle. Elle se réinvente chaque jour et ne se laissera pas dépouiller de ses rêves de construire un pays où il fait bon de vivre.
Monsieur Tebboune  sait parfaitement qu’il a été élu dans un scrutin que le Hirak a tenté d’empêcher et auquel la Kabylie n’a pas participé, cela le met dans l’obligation historique de réhabiliter la souveraineté du peuple algérien pour obtenir sa confiance. Le compteur de la légitimité ne s’est pas arrêté dans les urnes du 12 décembre 2019. Au contraire, il a commencé avec les engagements que le président a pris, la main sur le cœur, de faire de l’Algérie un État de droit et de redonner à son peuple liberté, justice et bien-être. Il s’agit de cette nouvelle Algérie qu’il évoque régulièrement. Il s’agit de cette Algérie que des millions d’Algériens ont revendiqué dans les rues. Il s’agit de cette Algérie gorgée de sang de nos martyres. Est-elle réellement en train de se construire? Les Algériens ne veulent plus de promesses qui ne se tiennent pas, de faux espoirs, de mensonges des politiciens, ils ont besoin de croire que cette fois le rêve se réalise, enfin. Et que le 5 juillet 2020, entre dans l’histoire, avec une nouvelle dimension, une autre victoire du peuple, son émancipation de la voyoucratie.

L’Algérie a besoin de décisions courageuses pour sortir de l’impasse. La force du Hirak est dans cette jeunesse prête à renouveler la classe politique et institutionnelle du pays. Il incombe au président Tebboune de lui ouvrir les portes. Comme il lui incombe de dissiper le sentiment de méfiance qui agite la société et trouver les moyens d’apaiser les tensions pour un dialogue ouvert, franc et inclusif. L’heure est grave et l’Algérie ne peut pas faire l’économie d’un compromis politique entre les siens. Il y va de notre esprit d’appartenance à ce pays, à son peuple et son histoire.

Pour la nouvelle Algérie
Gloire à nous chouhadas

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