Hamid Gouri revisite l’oeuvre de Malek Haddad

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Hamid Gouri revisite l'oeuvre de Malek Haddad
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“Le Quai aux fleurs ne répond plus”, l’œuvre majeure de Malek Haddad, est adaptée aux planches. Cela donne un résultat étonnant.


“Rassif ennouar majawebch” la nouvelle pièce de Hamid Gouri a été présentée, jeudi 1 avril au soir, au Théâtre régional Mohamed Tahar Fergani de Constantine, à l’occasion du Printemps théâtral de l’ancienne Cirta. C’est une adaptation de Bouziane Benachour du roman de Malek Haddad “Le quai aux fleurs ne réponds plus”, paru en 1961. Selon les critiques, ce roman, court et dense, serait une autobiographie de Malek Haddad. Il est le dernier de quatre romans publiés entre 1958 et 1961, le premier était “La dernière impression”.


Trahir son ami ou sa patrie?

“Le Quai aux Fleurs ne répond plus” raconte l’histoire de Khaled Ben Tobal, écrivain et poète algérien exilé à Paris, alors que l’Algérie était en guerre contre l’occupant français dans les années 1950. Khaled retrouve Simon Guedj, son ancien camarade d’un lyçée de Constantine. Il constate que Simon a déjà oublié l’Algérie où il est né.

Son épouse Monique ne cache pas ses sentiments pour Khaled, devient de plus en plus “collante”. Refusant de trahir son ami, il la rejette. La trahison va envahir de partout. Quel est le sentiment le plus dur ? Trahir son ami ou sa patrie?


Ce sentiment douloureux est présent sur scène à travers plusieurs tableaux rapides, parfois expéditifs, conçus par Hamid Gouri. Khaled (Atef Krim) est mis devant plusieurs situations où il doit trouver le mot juste, le geste précis. Il est dans un déchirement.

Retour incertain

Ourida (Mouna Bensoltane), épouse de Khaled, revient à chaque fois pour rappeler que la terre l’attend toujours. Elle est parfois attachée à des cordes qui rappellent les ponts de Constantine. Les cordes peuvent sauver comme elles peuvent tuer.  Mais Ourida va-t-elle résister à l’attente d’un retour incertain de Khaled? L’écrivain exilé ne reçoit plus de réponse d’Ourida. La trahison peut prendre d’autres formes.


Mais, comment l’exprimer sur scène ? Hamid Gouri s’est appuyé sur une scénographie dynamique de Mourad Bouchehr pour dire beaucoup de choses sans verser dans la narration explicative, les tirades ennuyeuses. Paris, ses charmes, ses tentations et ses musiques n’attirent pas Khaled. Le spleen ne le quitte pas malgré les “avances” de Monique (Yasmine Abbassi). L’atmosphère parisienne est restituée dans des scènes rapides. Ce n’est pas là l’essentiel.

La chorégraphie, exécutée par Ali Khelifi (qui a interprété le rôle de Simon) et Mohamed Hadri, complète parfois le récit. Le metteur en scène a convoqué le personnage de Napoléon (Mohamed Reda Boussaid) et a imaginé un Che Guevara au féminin pour suggérer l’arrière-fond de l’histoire racontée par Malek Haddad, celle du colonialisme et ses méfaits.  


Le temps qui passe

La première scène montrant Napoléon, avec son uniforme de “conquête”, traînant un boulet en criant dans une atmosphère rouge, sur fond de “Sobhan Allah ya ltif” de M’hamed El Anka, peut évoquer la fin tragique et sanglante des systèmes d’occupation.
Deux “voitures” se déplacent continuellement sur scène pour suggérer l’instabilité affective des personnages et pour représenter “le train”, fortement présent dans le spectacle. Il semble être le symbole du temps qui passe. Vite. Autant que la vie.


La scénographie de “Rassif ennouar majawebch” est également sonographique. Elle est tout aussi expressive, malgré une certaine surcharge, que les répliques. Le rythme de la pièce est accéléré, perturbant parfois le spectateur.

Le metteur en scène donne l’impression d’être contre l’immobilisme, la rigidité, la non action. Hamid Gouri semble également avoir dépassé l’adaptation de Bouziane Benachour. Il a puisé dans le burlesque, après avoir survolé la tragi comédie et la tragédie, comme dans cette scène où Bimbo (Mohamed Cherif Oudini) conduit Khaled à la gare alors qu’il est aveugle. Bimbo confie avoir été forcé de manger son propre âne en raison de la famine liée à la guerre malgré l’attachement qu’il avait pour l’animal.


“La folie” de Hamid Gouri

Il nous fallait la folie de Hamid Gouri Pour comprendre et transposer sur scène les métaphores de l’écrivain du  “Quai aux Fleurs ne répond plus”, souligne la critique et metteure en scène Hamida Ait El Hadj.
Rencontré après le spectacle, Hamid Gouri a confié que le texte remis pour être mis en scène était plat. “J’étais obligé de revenir au roman de Malek Haddad pour réécrire le texte”, a-t-il dit. Il a regretté que la pièce, qui a été produite par le Théâtre régional d’Annaba,  n’ait pas été sélectionnée au 14ème Festival national du théâtre professionnel (FNTP) d’Alger qui s’est déroulé du 11 au 21 mars 2021.
“Bouziane Benachour était membre du jury de ce festival.

Il aurait dû refuser par signe de solidarité après notre mise à l’écart. Mon spectacle n’a pas été retenu parce qu’il y a des répliques en français. Il s’agit de gens qui ont un haut niveau et qui n’acceptent que le théâtre de l’idiotie, les sketchs. Je n’aime faire rire les gens d’une manière stupide”, a-t-il protesté. Il dit avoir fait un plaidoyer pour l’amour dans la pièce. “L’amour change le cours de l’Histoire, change les événements”, a-t-il appuyé.


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