Oskar et Lilly” de l’iranien Arash Riahi, projeté à l’occasion des 7ème Journées du film européen à Alger, est un long métrage qui célèbre l’amour et qui dévoile l’effondrement de certaines valeurs.
Inspiré du roman de Monika Helfer, “Oskar et Lilly”, un film de production autrichienne, a un autre titre en allemand : “Ein bisschen bleiben wir noch” (Nous resterons encore un peu). Le titre en allemand exprime mieux l’histoire narrée par ce drame social. Deux enfants Tchétchènes, sans papiers, changent de prénom pour “s’intégrer” à la société autrichienne, Lilly (Rosa Zant) et Oskar (Leopold Pallua). Un jour, la police débarque chez eux avec un arrêté d’expulsion. Leur mère (Ines Miro), une réfugiée, tente de mettre fin à ses jours. Les deux enfants sont placés provisoirement dans des familles d’accueil. L’expulsion est suspendue jusqu’à la guérison de la mère.
Débrouillard, courageux et intelligent, Oskar s’adapte rapidement à une famille végétarienne même s’il réclame à chaque fois un morceau de viande. Il se lie d’amitié à Erika (Christine Ostermayer), un grand-mère souffrant de la maladie de Parkinson et de peu de considération. La présence d’Erika à la maison semble agacer le couple, mais pas Oskar qui s’occupe autant de la malade que de l’enfant unique de ce couple.
Un enfant comme un adulte
Lilly, elle, s’adapte avec peine malgré la tendresse dont fait preuve Rut (Simone Fuith), la femme qui l’accueille chez elle, en relation libre avec un homme. Lilly fait la connaissance au lycée de Betty (Anna Fenderl), fille d’une prostituée. Oskar et Lilly vivent mal la séparation et cherchent à retrouver leur mère.
Le réalisateur a trop “chargé” Oskar au point de le faire jouer comme un adulte. Oskar agit, parle et réfléchit comme un homme. Il évoque Hitler, la voiture électrique, la Tchétchénie, l’Argentine…Des choses qu’un enfant est censé encore ignorer.
Au delà de la thématique de l’amour et de sa puissance, de la question de la vulnérabilité des migrants en Europe et de l’attachement à la famille, “Oskar et Lilly”, construit à partir scénario modeste, dresse le portrait pessimiste d’une société autrichienne en déperdition avec le naufrage des personnes du troisième âge, souvent livrées à elle même, le chômage qui pousse des femmes à la prostitution, la démission des parents, la violence dans le milieu scolaire, la peur de l’étranger, la bureaucratie migratoire… en un mot, l’inhumanité.
25 % des autrichiens sont d’origine étrangère
Christine Moser, ambassadrice d’Autriche, a déclaré avant la projection du film, que 25 % de la population de son pays est d’origine étrangère. “Actuellement, près de 50 % des habitants de Vienne sont des migrants. En 2022, le nombre des demandeurs d’asile à triplé. La plupart sont des afghans, des syriens, des turcs et des pakistanais. L’Autriche a accueilli plus de 100.000 ukrainiens en raison de la guerre”, a-t-elle détaillé.
L’Autriche demeure un pays peu peuplé comparé à son voisin allemand, à peine neuf millions d’habitants, fin 2022. Vienne reste opposé à l’élargissement de l’espace Schengen. Le chancelier Karl Nehammer était en visite en Bulgarie la semaine écoulée.
“La Bulgarie doit être en mesure de construire une protection frontalière aussi robuste que la Grèce. Pour cela, les fonds nécessaires doivent être dégagés du budget de l’Union Européenne (UE). Nous devons appuyer encore plus fort sur le frein de l’asile, non seulement en Autriche, mais dans toute l’Europe », a-t-il déclaré.
Beaucoup de migrants et de demandeurs d’asile entrent en Europe à partir de la frontière entre la Turquie et la Bulgarie. Karl Nehammer est président de Die Volkspartei (Parti populaire autrichien) d’orientation chrétienne-démocrate. Réunis à Stockholme, jeudi 26 janvier, les ministres de l’Intérieur de l’UE ont décidé “d’accélérer” le retour des “migrants clandestins” chez eux. Autant dire que l’histoire d’Oskar et Lilly peut se répéter en des milliers de versions…dans l’Europe de la peur.
