Bouabdellah Ghlamallah, ancien ministre des Affaires religieuses : “Le projet de la Grande Mosquée d’Alger a coûté 80 milliards de dinars”

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Bouabdellah Ghlamallah, ancien ministre des Affaires religieuses :
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Le Haut Conseil islamique (HCI) vient de publier un livre dans lequel Bouabdellah Ghlamallah, ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, entre 1997 et 2014, revient sur le projet de la Grande Mosquée d’Alger.

Rencontré au 25ème Salon international du livre d’Alger (SILA), qui s’est déroulé du 24 mars au 1 avril 2022, l’actuel président du HCI explique comment ce projet a été lancé, officiellement achevé en avril 2019. Djamaa El Djazair est considérée comme la plus grande mosquée d’Afrique.


24H Algérie: Comment l’endroit a été choisi pour implanter le projet de la Grande mosquée d’Alger avant de lancer la construction en 2012 ?


Bouabdellah Ghlamallah: Au départ, il n’y avait aucune idée sur l’endroit où pouvait être implanté le projet de la Grande Mosquée d’Alger. A El Mohammadia, le terrain rocailleux n’était pas réellement préparé à accueillir le projet. Sur place, il y avait une distillerie de vins datant de l’époque coloniale et un espace d’élevage de chevaux. En fait, cet espace a été transformé en dépôts loués aux commerçants en toute illégalité. Il y avait également une église de Charles Lavigerie. Tout le quartier portait son nom ( Charles Lavigerie était archevêque d’Alger en 1867, fondateur de la Société des missionnaires d’Afrique (les Pères blancs )).


N’avez-vous pas prévu un autre terrain qu’El Mohammadia à Alger ?


Bouabdellah Ghlamallah: Dès le départ, c’était le meilleur endroit. Nous n’avons pas cherché d’autres terrains.


Comment la décision politique a été prise pour construire une grande Mosquée à Alger ?


Bouabdellah Ghlamallah: L’idée de construire une grande mosquée à Alger remonte en fait à l’époque de Houari Boumediene. Et Abdelaziz Bouteflika l’a mis à exécution après son élection. Il fallait chercher des entreprises intéressées par la conception du projet. Nous avons reçu treize propositions d’Europe, d’Asie et d’ailleurs, après un concours international.


Et comment a été choisi le plan final ?


Bouabdellah Ghlamallah: C’était le plan qui répondait à toutes les conditions et normes d’un projet intégré comprenant une mosquée, un musée, un centre culturel, un centre touristique et un monument historique. La mosquée s’appelle Djamaa El Djazair جامع الجزائر. Al Djazair renvoie à l’Algérie, pas à Alger.


Il y a eu une polémique sur le coût réel de la grande mosquée d’Alger. Combien a finalement coûté ce projet ?


Bouabdellah Ghlamallah: Une enveloppe de 120 milliards de dinars algériens a été dégagée pour le projet de la grande mosquée d’Alger. Toutes les dépenses effectuées pour ce projet n’ont pas encore atteint cette somme. Avec la fin des travaux, le projet a coûté 80 milliards de dinars. Les deux ponts menant vers la mosquée ont été ajoutés. Ces travaux supplémentaires ne vont pas coûter plus que 10 milliards de dinars. Tout le projet ne va pas dépasser les 100 milliards de dinars. Certains ont prétendu que la grande Mosquée d’Alger a coûté beaucoup d’argent…


Est-ce que le projet a rencontré des entraves avant son lancement ?


Bouabdellah Ghlamallah: Certains ont essayé de faire dire, à travers des bureaux d’architecture algériens, que l’architecture de la grande mosquée d’Alger n’était pas bonne, était fausse et que le terrain ne pouvait pas supporter le poids de la construction. Ceux qui ont agi de la sorte étaient opposés au projet de la mosquée. Cette opposition était visible  dans les journaux à l’époque.


Qui était derrière cette opposition ?


Bouabdellah Ghlamallah: Certaines personnalités algériennes qui n’étaient pas d’accord avec le projet de la mosquée. La grande mosquée d’Alger est une réponse matérielle aux affirmations de la France qui disait (à l’époque coloniale) avoir possédé l’Algérie. En 1930, la France a, pour célébrer les 100 ans de l’occupation de l’Algérie, inauguré plusieurs nouvelles constructions modernes dans plusieurs villes comme La Grande poste à Alger, la Mairie de Skikda, la Gare d’Oran, la Mairie d’Annaba, etc. Pour les français, c’était une manière de consacrer l’idée d’une présence et d’une possession durable de l’Algérie. L’Algérie réelle est représentée par la Grande mosquée. L’Algérie n’a jamais fait partie des “biens” de la France. Le pays a été certes occupé, mais jamais possédé. Et, les Algériens n’ont jamais été français. Pour vous le dire franchement, “les représentants” de la France en Algérie se sont opposés au projet de la Grande Mosquée d’Alger.

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1 commentaire

  1. Juste une question : et si cet immense espace, si idéalement situé, et cet immense enveloppe budgétaire -surtout en ces temps de crise et de récession- avaient été consacrés à l’édification d’un grand centre hospitalo-universitaire ? Un CHU qui formera les médecins de demain dans d’excellentes conditions, si indispensables en ces temps pandemiques ?
    La symbolique est importante et M. le président du HCI a raison de mettre le doigt dessus. Cependant, que dire de celle-ci : les “grands” hôpitaux d’Alger son situés dans des bâtisses coloniales (CHU Mustapha, Parnet, Mailllot, Béni-Messous, Birtraria, la clinique des Orangers, Les Glycines). Cette symbolique n’est-elle donc pas importante, en 2022 ?
    Et si l’Algérie officielle a encore besoin de se justifier vis-à-vis de la France, 60 ans après l’independance du pays, alors qu’elle se justifie par son indépendance économique; qu’elle se justifie en mettant un terme aux racines du mal qui font fuir les enfants de ce pays, qui préfèrent mourir en mer, dans l’hypothétique espoir de rejoindre…la France, au lieu de rester vivre dans leur pays; qu’elle se justifie en édifiant un État moderne, républicain, respecteux des valeurs de démocratie, d’égalité, des droits humains et de la souveraineté populaire.
    A chacun sa symbolique / priorité, mais celle du moment, la plus pertinente, est celle qui offre un avenir reluisant pour tout un peuple qui s’est senti obligé de sortir dans les rues, par millions, pour réclamer ce qui est censé être une évidence pour tout peuple ayant vécu les affres du colonialisme abject : un État de droit.
    Mes salutations à M.Ghulamallah.

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