Bjorn Haggmark, ambassadeur de Suède à Alger :
« La Suède ne soutient en aucune manière les opinions islamophobes »

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Bjorn Haggmark, ambassadeur de Suède à Alger :
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En poste à Alger depuis septembre 2021, Bjorn Haggmark, ambassadeur du Royaume de Suède, revient dans cette interview sur la coopération économique et culturelle entre son pays et l’Algérie. Il s’exprime sur la vive polémique provoquée par un extrémiste de droite suédo-danois Rasmus Paludan qui a brûlé un exemplaire du Coran, samedi 21 janvier 2023, devant l’ambassade de Turquie à Stockholm, sous protection policière suédoise.


Un acte qualifié d’haineux et de provocateur par les pays musulmans.  Ce chef du parti extrémiste danois Stram Kurs (Ligne dure) a récidivé en brûlant un autre exemplaire du Coran, vendredi 27 janvier, devant une mosquée à Copenhague, capitale du Danemark, sous protection policière également. L’Algérie a qualifié  l’acte « d’abject « de nature à provoquer la haine et les sentiments religieux des musulmans ».


24H Algérie: La Suède a une présence diplomatique ancienne en Algérie. Comment évolue la coopération culturelle entre les deux pays ?

Bjorn Haggmark: Dans les relations entre deux pays et deux peuples, il y a beaucoup d’aspects. Il s’agit de mieux se connaître, de connaître l’histoire,  d’échanger des expériences. Il s’agit aussi d’avoir des perspectives sur l’avenir. Aussi, les contacts sont-ils essentiels. Avec les moyens limités que nous avons à l’ambassade, nous essayons de trouver des thèmes, des occasions et des partenaires pour enrichir ces perspectives et ces connaissances. Le cinéma et la musique sont des moyens excellents pour densifier les relations et pour mieux se connaître.

Avez-vous des projets en matière de coopération culturelle ?

Cela fait plusieurs années que la Suède participe aux festivals de films organisés par la Délégation européenne à Alger. Nous participons aussi au Festival international du cinéma d’Alger (FICA). Le documentaire « Catwalk » du réalisateur suédois Johan Skog a décroché le prix du public lors de la dernière édition du FICA en décembre 2022.


Nous prenons part aussi régulièrement au festival culturel européen à Alger et aux festivals internationaux organisés en Algérie comme ceux de la bande dessinée, de la musique symphonique ou le Salon du livre.


Nous avons l’intention de continuer d’être présents dans le domaine culturel et artistique. Nous participons à l’effort de plusieurs ambassades européennes en Algérie pour encourager la critique cinéma à travers Eunic (une association d’organismes culturels nationaux ou officiels de l’Union européenne qui représentent les relations culturelles). Nous voulons encourager des projets dans les domaines des autres arts, de la mode, du design…Une manière de stimuler la créativité qui ouvre beaucoup de portes entre nos deux peuples.


Qu’en est-il de la coopération économique entre votre pays et l’Algérie ?

La dimension la plus importante dans nos relations économiques actuellement, c’est le commerce et la possibilité d’investissement. Pour le commerce, nous plaidons pour un échange dans les deux sens.


En 2021, la valeur des exportations algériennes vers la Suède était de 12 millions de dollars, en hausse sensible. Nous achetons à l’Algérie des produits chimiques, des produits manufacturés et des lubrifiants et nous lui vendons des machines, des équipements médicaux et de télécommunications et du bois. La même période, la valeur des exportations était de 257 millions de dollars.  Nous encourageons les exportateurs Algériens d’explorer le marché suédois. L’Accord d’association entre l’Union européenne (UE) et l’Algérie et le Partenariat renouvelé de voisinage offrent beaucoup de possibilités pour les exportations en Suède et pour la coopération économique. Il existe des organismes suédois qui donnent des informations.


Existe-t-il des secteurs qui peuvent intéresser les entreprises suédoises en Algérie surtout qu’une nouvelle loi sur l’investissement offrant plus de facilités a été mise en vigueur dernièrement?


Il y a de l’intérêt et des possibilités pour la transformation verte, la sous-traitance industrielle, la recherche et la numérisation. Pour la numérisation, cela peut concerner autant  la fonction publique que les entreprises ou les associations. Il s’agit aussi de s’appuyer sur la numérisation pour augmenter l’efficacité énergétique, économiser de l’énergie. Il est important d’utiliser d’une manière efficace et utile les ressources qui existent en pensant à l’avenir. Vous savez certainement que la Suède œuvre pour se débarrasser de l’énergie fossile dans les vingt prochaines années.


Est-ce que le gaz naturel algérien intéresse la Suède ?

Non. En Suède, la consommation de gaz naturel est faible. Nous avons d’autres sources d’énergie (nucléaire, éolien, biomasse, hydroélectricité, etc). Mais, pour l’Europe, le gaz naturel a de l’importance (les pays de l’UE cherchent à se libérer de la dépendance du gaz russe en raison de la guerre en Ukraine). L’accès au gaz naturel pour répondre aux besoins européens influent sur le niveau des prix de l’énergie en Suède même s’il  n’y a pas d’implication directe. A terme, l’offre algérienne en gaz pourrait avoir de l’intérêt en Suède.

Etes vous satisfait du niveau des échanges actuels entre l’Algérie et la Suède ?


Tant l’Algérie que la Suède veulent augmenter les échanges. Les deux pays s’intéressent au commerce international. Il reste que le volume des échanges entre nos deux pays est limité. Il y a certainement des possibilités de les augmenter. En Suède, nous pensons que nous avons des solutions durables et de qualité pour l’Algérie dans certains secteurs économiques et techniques.


La Suède projette d’accéder à  l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord  (OTAN). Elle a déposé sa demande en mai 2022.  Est-ce que cette accession aura des conséquences sur ses relations extérieures notamment ceux du Moyen Orient-Afrique du Nord (MENA)?


Il est vrai que la Suède est en train d’accéder à l’OTAN. Le gouvernement suédois souhaite que ce processus soit achevé le plus tôt possible. Je ne crois pas que cela va changer nos relations avec l’Algérie ou les pays de la région MENA.


La Suède abandonne donc sa neutralité historique…

Cela fait plusieurs années que la Suède n’est pas un pays neutre. La Suède est un pays non aligné militairement. On sort en effet de plus de 200 ans de neutralité. Ce changement est motivé par les développements en Europe surtout ces derniers temps (guerre en Ukraine depuis février 2022). Stockholm a estimé que pour la sécurité du pays et de l’Europe, la Suède devait adhérer à l’OTAN. La sécurité de l’Europe est aujourd’hui menacée d’une manière évidente.


L’extrémiste de droite suédo-danois Rasmus Paludan a brûlé un exemplaire du Coran devant l’ambassade de Turquie à Stockholm. Un acte dénoncé par les pays musulmans. Comment réagissez-vous à cet acte ?


L’ambassade et le gouvernement suédois comprennent que les musulmans soient offensés par cette opinion islamophobe exprimées par quelques individus en Suède lors d’une manifestation. La Suède ne soutient en aucune manière les opinions islamophobes. Il y a des efforts en Suède pour contrer l’islamophobie. La Constitution suédoise garantit la liberté d’expression, d’opinion et de manifestation mais aussi la liberté de religion, cela couvre aussi l’islam.

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